9 mai 2021 : l'Europe ne peut plus se contenter de sa médiocrité


J'ai récemment découvert, grâce à la talentueuse chanteuse Valentina Volpe Andreazza, le texte italien de l'Hymne à la Joie.

Une bonne façon de commencer cette journée dédiée à l'Europe, non pas comme un concept géographique, mais comme une idée d'union, de fraternité et donc de force, de capacité à résoudre les problèmes, à penser et à réaliser un avenir meilleur. Cette Union européenne n'est encore que partiellement réalisée et dépend de chacun. Non seulement des les institutions, mais aujourd'hui plus que jamais de notre capacité à utiliser au mieux les instruments de notre démocratie, même si celle-ci est souvent hésitante et très très imparfaite. 
Par exemple, aujourd'hui, c'est le jour de www.eusignday.eu : nous vous demandons de vous mobiliser et de signer les initiatives de lois citoyennes européennes que vous trouverez sur le site web et qui demandent à l'UE de faire de nouvelles lois sur le prix du CO2 pour financer la relance verte et plus d'emplois, sur le salaire minimum, sur la sauvegarde des abeilles, etc. Les promoteurs de cet outil peu utilisé et qui doit être réformé pour être vraiment efficace se sont réunis et ont décidé de se soutenir mutuellement.
Aujourd'hui s'ouvre aussi la Conférence sur l'avenir de l'Europe ; elle  n'est pas exactmenet ce que j'avais espéré: une consultation large et ambitieuse des citoyens et résidents européens selon des méthodes innovantes qui auraient pu être organisés au niveau national et surtout européen ; Elle n'est finalement devenue qu'au dernier moment (ce matin) une collection de parlementaires européens et nationaux complétée par un ajout "citoyen" de 108 personnes pour représenter les Forums qui se tiendront un peu partout et dont un tiers aura moins de 25 ans, mais sur la liberté d'action desquels plane un comité exécutif qui décidera par consensus et dont la composition a été faite après une année pour le moins douloureuse et litigieuse. 
Une année au cours de laquelle le scepticisme de nombreux gouvernants -  ceux de divers gouvernements réactionnaires que nous connaissons mais pas seulement - a pu instiller son scepticisme sur la créativité et la sagesse des peuples et leur capacité - s'ils sont organisés selon des procédures appropriées - à donner une forte impulsion au projet européen. Un élan qui est plus que jamais nécessaire aujourd'hui, alors que la pandémie frappe encore durement, que la guerre reste à nos frontières et que la véritable démocratie régresse. L'Union européenne ne peut plus se contenter de sa médiocrité. Elle doit se donner les moyens d'agir. La session plénière de la conférence doit devenir la cible d'une action ciblée et concentrée. S'ils ont empêché la voix des citoyens et des associations d'être véritablement dominante en leur laissant le temps de se préparer, nous ne pouvons nous résigner à des débats ennuyeux et stériles.
Des demandes claires doivent émaner des forums de citoyens qui seront organisés (espérons-le), de la plateforme européenne en ligne super-technologique qui vient d'être créée, à laquelle nous devrions TOUS nous abonner. 
Une action à combiner aussi avec les initiatives des citoyens européens dont je parlais précédemment. 
On est pas en manque des themes à discuter et faire avancer. On veut plus de pouvoirs et de ressources aux politiques de l'éducation, de la santé et du climat ; de taxes sur le CO2 ; de taxes sur les grandes entreprises multinationales ; plus d'outils communs de lutte contre la pauvreté et pour l'intégration des migrants ; de règles claires et communes en matière d'asile et de migration. Et peut-être, en cette fête des mères, alors que certains en profitent pour vouloir repousser les femmes à la maison, plus de ressources et de lois contre la discrimination et l'inégalité des sexes. 
Mais surtout, une proposition doit arriver plus forte que les autres car tout le reste en dépend. Une proposition de dignité CONSTITUTIONNELLE. 
Basta avec le droit de veto ; assez de l'obligation d'unanimité qui est le véritable cancer qui empêche l'UE de réaliser son potentiel et l'humilie.
Aucun État ou gouvernement ne devrait plus jamais bloquer une action commune. C'est sur ce pouvoir, qui n'a parfois même pas besoin d'être appliqué mais seulement d'être menacé, que repose le pouvoir d'Orban et du gouvernement polonais, qui pèse encore sur le plan de relance et d'autres. Ou encore la capacité de certains gouvernements égoïstes, de Kurz à Rutte, mais aussi du suave finlandais Sirin à réduire les ambitions d'une solidarité commune. 
C'est ce pouvoir des gouvernements d'empêcher l'action commune qui nous ralentit sur les vaccins ou nous rend ridicules et sans intérêt dans le monde, incapables de défendre ceux qui luttent pour la liberté en invoquant nos valeurs et tolérants avec des régimes qui non seulement répriment leurs citoyens mais menacent aussi notre économie. 
Le fonctionnement de l'UE rappelle parfois celui de la Société des Nations qui n'a pas permis d'arrêter la guerre la plus cruelle du XXe siècle.
Les risques ne sont pas si invraisemblables: les navires de guerre britanniques et français déployés près de l'île de Jersey après les manifestations de pêcheurs français peuvent sembler être une plaisanterie, mais ils sont au contraire un rappel fort de la facilité et de la banalité avec laquelle on peut cesser de se battre avec des mots et des lois et commencer à le faire avec des armes. La Méditerranée est toujours un cimetière et, contrairement à ce qui se passait il y a quelques années, l'UE avec Frontex ne cache même pas son indifférence : c'est une façon de couvrir l'impuissance à prendre des décisions claires et le cynisme : et pourquoi ?  Parce qu'il n'y a pas d'accord unanime sur la modification du règlement de Dublin et on renonce a en parler. Meme histoire sur les taxes sur les entreprises et les multinationales qui profitent de la concurrence entre les États pour les attirer avec des taxes minimales: là aussi, l'UE pourrait légiférer mais ne le fait pas car il n'y a pas d'unanimité entre les États membres. Ou la politique sociale, sujet d'un evenement declassé par Charles Michel (encore lui!) de Conseil européen à "workshop" et qui vient d'avoir lieu à Porto mais qui a vu encore une fois les etats membre freiner des deux pieds l'initiative de la Commission. Je pourrais continuer avec de nombreux exemples, mais je voudrais ici souligner qu'en ce jour, le 9 mai 2021, c'est notre responsabilité de citoyens qui est en jeu. Nous ne pouvons pas compter sur les grands leaders. Ni sur des médias traditionnels ou sociaux pollués par le populisme et la simplification. Ni sur un système institutionnel incapable de se réformer, car pour modifier les traités.... Il faut l'unanimité.
Mais comme l'ont montré les jeunes du climat, et bien d'autres avant eux dans des moments plus tragiques de notre histoire, la force des personnes et des idées peut finalement faire son chemin dans nos démocraties fatiguées mais toujours vivantes. Tout le monde ne peut pas en dire autant. Profitons-en donc au maximum. Maintenant.